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LA PERCEPTION DE LA MUSIQUE TRADITIONNELLE IRLANDAISE
EN IRLANDE DU NORD



Le point de départ de cette communication est le sentiment ancré parmi les protestants d'Irlande du Nord selon lequel la musique traditionnelle irlandaise ne lui appartient pas. Une dichotomie est ainsi établie entre deux groupes sociaux, voire pour certains entre deux cultures séparées, avec d'un côté du "mur de la paix" les défilés des marching bands et les ballads orangistes, et de l'autre les jigs, les reels et les ballads républicaines. Entre les deux, point de salut.
Cette vision défendue par de nombreux acteurs de la scène musicale irlandaise, voire par des hommes politiques irlandais au Nord et au Sud, a ainsi été mise en exergue par Bill Clinton lors de sa visite à Belfast en novembre 1995 :
"Ici en Irlande du Nord s'opère grâce à vous un miracle, un miracle symbolisé par ces deux enfants qui se tenait la main et qui nous ont dit ce qu'il fallait comprendre : au pays de la harpe et du violon, du fifre et du tambour Lambeg, deux fières traditions se rejoignent dans l'harmonie de la paix".
On peut effectivement considérer sans risque de se tromper que la musique en Irlande est porteuse de symbole de façon encore plus marquée qu'ailleurs. Et pour ceux qui en douteraient encore, rappelons que lors des négociations de 1995 portant sur les parades orangistes, les habitants des quartiers catholiques étaient disposés à laisser passer ces défilés à la seule condition que les musiciens cessent de jouer durant la traversée de la zone catholique. Comme le faisait remarquer David Green, de l'Université de Leeds, qui oserait aller siffler "The Soldier's Song" sur Sandy Row ou "The sash my father wore" dans le Bogside ?
Les questions qui restent posées à travers ces exemples exigent de prendre en considération plusieurs facteurs, historiques, sociaux et musicaux. Nous nous en tiendrons à certains d'entre eux, et en particulier :
- Quelles représentations de ces groupes sont données au travers du vaste corps de la musique chantée ?
- A quelle période peut-on considérer qu'une différence s'est établi entre certaines pratiques des groupes protestants et les pratiques des catholiques ?
- Sommes-nous véritablement en présence de deux cultures ? Et enfin,
- Qu'appelons-nous la musique irlandaise en Irlande du Nord ?

HISTORIQUE

Je rappelle ici pour mémoire que les échanges, musicaux ou non, entre l'Ecosse et l'Irlande avant les Plantations ont toujours été nombreux. On sait par exemple que le nom du pays provient d'une tribu irlandaise ayant envahi l'Ecosse au Ve siècle (les Scotti) pour fonder le royaume Irlando-écossais de Dal Riada. Les liens linguistiques sont donc une première évidence. Sur le plan musical, il est très possible que certaines harpes du XVe siècle appelées "Petite Harpe Irlandaise à Tête Basse" soient en réalité le fait de luthiers écossais[1]. De même, les harpeurs des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles se côtoyaient souvent, tel l'Ecossais Ruaidhri Dall Morison se rendant en Irlande pour parfaire sa maîtrise de l'instrument, ou les harpeurs irlandais itinérants Denis Hempson et Rory Dall Ó Catháin étendant leur territoire de voyage à l'Ecosse.
Ce sont cependant les Plantations d'Ulster qui amenèrent au XVIIe siècle et de façon permanente la religion protestante. On estime ainsi que dès 1659 un tiers environ de la population adulte de cette province était d'ascendance écossaise ou anglaise, avec cependant d'importantes fluctuations en fonction des décennies et du cycle de rébellion - répression accentuée à partir de 1641 et l'arrivée de Oliver Cromwell.[2]

L'influence directe de la religion sur la musique en Irlande du Nord se fait sentir dès cette époque. Ainsi, le synode de Tuam en 1660, considérant la musique populaire comme source de débauche et instrument du diable, stipulait par exemple que "prohibentur tripudia, tibinices, symphoniae, commisationes et allii abusus in visitatione fonitum et aliorum sacrotum locorum" ("Sont interdits la danse, la flûte, les groupes de musique, les réjouissances et tous les abus lors des visites aux puits et autres lieux sacrés")[3]. La congrégation protestante la plus représentée en Irlande, les presbytériens, était en outre la plus respectueuse de ces préceptes. Mais il n'y a aucune raison de penser que les protestants dans leur ensemble aimaient moins la musique irlandaise que les catholiques.
Hormis les différences régionales, le principal clivage se situait entre les classes sociales ; les plus fortunés pouvaient se payer des maîtres de musique, quelle que soit leur religion. Cependant, les protestants bénéficièrent considérablement des Lois Pénales au début du XVIIIe siècle, lorsque la législation transféra peu à peu la propriété foncière entre leurs mains : on trouvera donc plus souvent des références musicales aux leçons de chant et de piano dans un contexte protestant.
L'importance symbolique de la musique est également attestée par le mouvement des United Irishmen, qui vit le jour à Belfast le 14 octobre 1791 et prit comme emblème la harpe et comme devise "Restrung, it will be heard" (“Recordée, elle se fera entendre”). Ce mouvement s'exprimait dans les colonnes du journal The Northern Star (1792-1797), fondé par des presbytériens et c'est dans ce périodique que l'on trouve les principaux commentaires sur le grand rassemblement de harpeur de 1792 à Belfast. Cependant les intentions clairement déclarées par les organisateurs ne semblaient guère perçues par le rédacteur :
"Although these partial representatives of the Ancient BARDS and Minstrels of Ireland, to the number of ten, did not afford a very high treat to the lovers of modern Music, yet we may venture to affirm that they gave entertainment to the musical critic, who delights in tracing the combination and progress of sounds from the first simple touches of melody up to the full tide of refined harmony. It appears that the principal reason for assembling them here originated in a work to rescue from total oblivion such NATIVE AIRS as were supposed to be in their possession alone, and which might prove an acquisition to the musical world, and an ornament to the Irish Nation. But in this they have not succeeded to any great degree, for they played very few tunes, but what were generally known, though not all committed to print, which is a kind of proof that the ancient Music of this country is not suited to the genius and disposition of its present inhabitants"[4]

Si l'on se tourne à présent, au cours de cette même période, vers les principaux artisans de la survie des œuvres populaires chantées ou instrumentales, on constate que la quasi-totalité des collecteurs étaient des protestants d'ascendance anglaise : Sur le plan économique ou sur le plan artistique, la recherche identitaire était dès cette époque, une question posée par les protestants irlandais.
C'est à l'occasion de ces rencontres de Belfast que la jeune Belfast Harp Society confia à Edward Bunting, alors âgé de dix-neuf ans, la tâche de noter tous les airs que joueraient les harpeurs afin qu’une trace demeure de l’héritage bardique.
Voici dans quel état d’esprit se situaient alors les organisateurs de ces rencontres de harpeurs de la fin du XVIIIe siècle :
"Quelques citoyens de Belfast (..) se proposent d’ouvrir une souscription qu’ils entendent utiliser pour tenter de ranimer et de perpétuer les antiques musique et poésie d’Irlande. Ils désirent ardemment préserver de l’oubli les quelques fragments qui sont parvenus à survivre, monuments du génie et du goût raffiné de nos ancêtres.[5]

De Joseph Walker (Historical Memoirs of the Irish Bards, 1786) à Edward Bunting (A General Collection of Ancient Irish Music, 1796), de George Petrie (Ancient Music of Ireland, 1855), à Patrick W. Joyce (Ancient Irish Airs, 1873) les grands collecteurs jusqu'à Francis O'Neill au début du XXe siècle étaient tous protestants. Notez ici la récurrence du terme "Ancient".
La musique devint donc, à partir de la fin du XVIIIe siècle et durant presque tout le XIXe siècle, l’une des façons d’affirmer une identité culturelle irlandaise, essentiellement distincte de l'île voisine.
L'une des principales illustrations de ce fait est le journal des Young Irelanders, The Nation (1842-1848 ; 1849-1897), fondé par les héritiers spirituels du journal de Belfast the Northern Star, Gavan Duffy et Thomas Davis. Gavan Duffy, en particulier, fut l'un des premiers à prendre conscience du caractère éminemment symbolique, quoique anodin en apparence, de la musique comme outil de propagande dans le contexte irlandais du XIXe siècle. Il demanda aux lecteurs du journal de composer de nouvelles ballades sur des thèmes musicaux familiers et le journal connut rapidement une très grande popularité. Avec un tirage de 12000 exemplaires et un lectorat annoncé de 250 000 personnes, ce porte-parole des classes protestantes aisées amorça de ce fait un renouveau, voire une renaissance de la ballade irlandaise.
La volonté d'affirmer une identité conduisit pourtant les apprentis-poètes de The Nation à décrire davantage une culture rêvée qu'une réalité quotidienne. Desmond Kenny expliquait à ce propos :
"Ainsi, de nombreuses ballades [de The Nation] sont à la forme impérative, comme par exemple “ Attendez votre Heure ” et “ Soyez Patient ”, ou encore une ballade pouvait comporter une morale, telle que “ Aide-toi et Dieu t’aidera ”. Dans ce cas de figure, The Nation s’adresse de façon condescendante au peuple, au lieu de chanter pour lui, et nous percevons le sentiment implicite de supériorité (...). Les ballades historiques de The Nation furent également écrites dans un but bien défini, et bien souvent la leçon à donner était plus importante que le récit lui-même".[6]

Ainsi, de 1842 à 1845 furent publiées plus de 800 ballades, toutes écrites en anglais, la plupart oubliées aujourd'hui. Mais certaines d'entre elles ont survécu et constituèrent longtemps le cœur des ballades politiques irlandaises, y compris et surtout pour les républicains les plus extrémistes. Desmond Kenny expliquait ainsi dans les années 1970 :
"Elles font partie du répertoire de tout orchestre de parade, et l’une d’entre elles, “ A Nation Once Again”, fut presque adoptée comme hymne national. Elles sont enseignées dans les écoles en tant que représentantes éminentes de notre tradition nationaliste chantée, et, encore aujourd’hui, peu de soirées musicales se passent sans que l’une d’entre elles au moins soit chantée."[7]


On sait que le propre des ballades n'est pas de présenter une vision neutre des faits. Dans le cadre nord-irlandais, on constate que toutes exaltent les héros de l'histoire irlandaise pour inspirer l'unité d'un groupe, quel qu'il soit. Toutes parlent de solidarité et toutes évoquent l'histoire, parfois dans un style humoristique. Enfin, toutes utilisent des termes codés pour désigner le "camp adverse" : ainsi, croppies, Molly Maguires, Fenians et papistes désignent les catholiques, tandis que les protestants seront des proddies. Dans la plupart des cas cependant, le but recherché ne sera pas tant la volonté de provoquer que la confirmation identitaire au sein du groupe, agissant en quelque sorte comme une traitement à usage interne.

Un autre point commun mérité d'être souligné : la langue utilisée, l'anglais, est la même pour les deux traditions chantées car le gaélique irlandais s'est peu immiscé dans cet univers. Une différence majeure s'impose cependant : les chansons nationalistes se contentent le plus souvent de chanter les louanges de leurs héros sans aborder le thème de la religion, à l'exception de quelques références codées du type "My love goes to meeting and I go to mass".[8] Les chansons orangistes, en revanche, tendent plus souvent à ridiculiser les catholiques et leur symboles, parmi lesquels le pape figure en bonne place. Il s'agit bien sûr dans ce cas de figure d'un moyen de s'assigner une identité davantage par opposition que par position. Mais l'humour n'en est pas absent, loin s'en faut, et y est même une caractéristique plus développée que dans les chansons dites "catholiques".
Ainsi, les ballades protestantes semblent figées dans des positions prises au XVIIe ou au XVIIIe siècles et perpétuées depuis : outre l'Eglise, les ennemis désignés y sont les organisations secrètes de type Rapparees, White Boys, Ribbonmen ou Defenders qui semèrent la terreur parmi les propriétaires terriens durant les années 1760-1790. Traversées par une certaine nostalgie, ces ballades ont souvent un air anachronique qui les rend quasi impénétrables à l'oreille moderne extérieure.
C'est le cas par exemple de la plus ancienne ballade imprimée située dans un contexte irlandais : Lilliburlero, attestée vers 1688, est une composition raillant les Irlandais catholiques partisans du roi Jacques II Stuart. En voici le dernier couplet :
"Dere was an old prophecy found in a bog,
Lilliburlero
Dat our land would be ruled by an ass and a dog,
Lilliburlero
So now dis old prophecy's coming to pass,
Lilliburlero
For James is de dog and Tyrconnel's de ass,
Lilliburlero."[9]

Ici, les personnages désignés font davantage référence à une vision du XVIIe siècle qu'à une véritable crainte de voir le Vatican envahir l'Irlande du Nord, mais dans la tradition protestante, ces chansons sont encore chantées avec délectation. Notons d'ailleurs que cet air est depuis 1943 l'indicatif de la BBC World Service, radio parfois critiquée pour son attitude néo-colonialiste.
Ce sont donc ces attaques au caractère anachronique qui poussèrent la NICRA (Northern Ireland Civil Rights Association) et le Alliance Party à déposer la première plainte en vertu du très récent "Prevention of Incitement to Hatred Act" (Loi de prévention contre l'incitation à la haine votée au Royaume-Uni en 1970) contre l'éditeur du recueil Orange Loyalist Songs 1971.
L'une des chansons de ce recueil déclarait en effet que l'on préférait voir les membres d'autres religions avec des balles dans le dos. Mais, malgré le scandale causé par la décision, le jury acquitta l'éditeur qui échappa à toute condamnation. Aucune plainte n'a été déposée depuis en vertu de cette loi et dans ce cadre.[10] Il est relativement aisé dans ces conditions de comprendre pourquoi les chansons protestantes sont infiniment moins publiées et enregistrées que les chansons catholiques.

Pour les catholiques, l’une des principales caractéristiques des ballades engendrées par les événements d’Irlande du Nord tient essentiellement à la pérennité d’un style utilisant le moindre incident, la moindre histoire, pour la composition de nouveaux couplets sur des mélodies le plus souvent préexistantes : parmi les événements les plus célébrés, les évasions de prisonniers républicains en novembre 1971, janvier 1972, octobre 1973 et août 1974 générèrent de très nombreuses chansons. On sait, à titre d’exemple, que la chanson “ The Men Behind the Wire ” de Paul McGuigan fut un immense succès commercial en 1971 en Irlande du Nord[11].
Mais dans les pubs, ces chansons politiques ne représentent aujourd'hui, tout au plus, qu’une infime partie du répertoire, disparaissant quasi naturellement en raison de leur caractère politiquement incorrecte et du malaise qu'elles tendent à générer de plus en plus souvent.
"Les Irlandais adorent chanter (...), Malheureusement, ce plaisir social du chant a été particulièrement exploité ces derniers temps par des chanteurs aux motivations politiques (...) ; des ‘chansons ‘rebelles’ cocardières pour patriotes de comptoir en sont fâcheusement venues à symboliser la chanson irlandaise pour les auditeurs occasionnels."[12]

Il est d'ailleurs tout à fait révélateur qu'un grand nombre de ballades orangistes ou républicaines (les "party songs") utilisent les mêmes mélodies pour exprimer des sentiments diamétralement opposés. Ainsi, les classiques nationalistes "The Wearing of the Green" et "The Rising of the Moon" figurent également au répertoire loyaliste sous le nom "The Orange ABC".[13]

Pour ce qui concerne à présent la musique et la danse, une dichotomie beaucoup plus claire s'est établi : c'est dans ce domaine que le rejet par les protestants d'une tradition populaire est le plus fort. Lors d'un colloque intitulé "Traditional Music: Whose Music?" organisé en 1991 par Co-operation North (aujourd'hui Co-operation Ireland), Lewis Singleton, de l'organisation pro-unioniste Ulster Society, déclarait :
"Pour notre part, nous considérons que la différence entre les deux traditions ethniques n'est pas suffisamment reconnue (...) et je pense que c'est une erreur de parler comme nous l'avons fait de musique traditionnelle irlandaise. (...) Si l'on reconnaît qu'il existe deux traditions ethniques, que certaines musiques sont propres à ces traditions, il convient alors de trouver les points communs entre ces deux traditions musicales. Mais il est impossible de les mettre de force dans le même panier."[14]
C'est donc sur ce point précis que les crispations sont les plus sensibles.
Il est effectivement nécessaire de comprendre que la province d'Ulster connaît des particularités musicales qui se traduisent par un style tout à fait distinct et immédiatement reconnaissable. En raison de l'influence historique des colons venus d'Ecosse, la langue gaélique, la langue anglaise, et la musique au Nord de l'île ont un caractère régional très marqué. Pour ce qui concerne le fiddle, par exemple, on considère le style du Donegal comme plus énergique, plus rapide, avec des coups d'archet plus vifs, plus rapides, d'où un jeu un peu plus détaché.
Ce style très particulier, ainsi que les mélodies propres au Nord (highland flings, mazurkas, barndances) a d'ailleurs longtemps joué en défaveur des musiciens du Donegal dans les compétitions ou les autres styles étaient considérés dans leur globalité comme 'la norme'. Un peu comme certains enseignants d'anglais considèrent encore le 'Queen's English' ou le 'BBC English' comme 'la norme'. Ainsi, les musiciens s'entendaient-il trop souvent rétorquer qu'ils ne jouaient pas de la musique irlandaise, mais une musique bâtarde et sans valeur.
On peut également noter que certains types de mélodies sont propres à des régions de l'île bien définies : si tous les musiciens du pays jouaient des reels, des jigs et des hornpipes, ceux du Kerry rajoutaient des polkas et des slides, et ceux de l'Ulster des barndances, des mazurkas et des highland flings. Mais qu'ils soient protestants ou catholiques, les Irlandais dansaient tous les mêmes danses arrivées du continent européen au cours du XIXe siècle, et cela sur les mêmes mélodies.
Les musicologues et historiens considèrent donc de façon unanime que la divergence établie plus haut par Lewis Singleton est le fruit de l'histoire très récente de l'Irlande du Nord, et qu'il est totalement artificiel d'établir une barrière entre une hypothétique musique catholique d'une part, et une musique protestante tout aussi hypothétique d'autre part.
Dans le comté de Down, par exemple, et en particulier dans sa partie Est, la transmission orale de la tradition musicale irlandaise a longtemps été le fait quasi exclusif des fiddlers protestants, et dans toute l'Irlande du Nord les soirées de danse organisées par les Orangistes comportent de très nombreux quadrilles, qui ne sont rien d'autre que le set dancing dansé dans toute l'Irlande.
De même, une activité très courue à partir du XIXe siècle dans toute l'Irlande, autant chez les catholiques que chez les protestants, et à condition que les finances le permettent, étaient la création d'un fife and flute bands, sorte de fanfare de type militaire. Elles n'ont cependant survécu que dans les milieux orangistes d'Irlande du Nord et forment le gros des troupes durant la "Saison des Défilés" de l'été. Ici encore, certaines mélodies sont clairement d'origine commune, avec pour seule différence réelle le tempo utilisé. Ce sont souvent des jigs revues et corrigées, moins ornementées et plus martiales dans les défilés :
"La trame de très nombreux airs considérés comme "Orangistes" ressemble à ceux du placard de la famille "Verte". "The Boyne Water" est exactement le même air que "Rosc Catha na Mumhan" (le cri de guerre du Munster), également connu sous le nom "Marchechaid na Buinne" ["la cavalcade de la Boyne"]. Les mélodies en elles-mêmes n'ont pas de message idéologique, et ce qui est considéré comme un air partisan, dépend d'étiquettes verbales et de la perception de l'auditeur."[15]

En matière de musique comme en matière de ballades, il est donc faux de penser que les échanges entre catholiques et protestants sont impossibles. Certains musiciens reconnus, comme John Kennedy de Cullybackey, dans le comté d'Antrim, sont aussi à l'aise dans un milieu protestant que dans un milieu catholique : protestant lui-même, il débuta comme joueur de fifre dans un Orange band et remporta le concours du Fleadh Cheoil dans la catégorie des chanteurs, avant de devenir l'un des meilleurs professeurs de flûte, aussi bien auprès des classes du Comhaltas Ceoltóirí Éireann qu'auprès des flute bands protestants.
Les exemple sont nombreux également de catholiques à l'aise en toutes circonstances, comme en atteste ces quelques lignes de Peter Kennedy :
"Jim O’Neill, alors âgé de 27 ans, était un tisserand portant des favoris à la Parnell, un passionné de football gaélique et jouait du tambour dans la fanfare du village. Bien que républicain, il apprit de nombreuses chansons grâce au tenancier de son pub, un orangiste farouche passé maître dans l’art du tambour Lambeg."[16]

Ce tambour Lambeg, apparu au début du XVIIIe siècle en Irlande, est sans doute l'un des principaux apports musicaux protestants. C'est le mouvement extrême des Orangistes, fondé en 1796, qui l'introduisit dans la musique militaire ponctuant ses commémorations.
On trouvera plusieurs théories sur l'implantation de ce tambour : il serait venu de Hollande avec les troupes du Duc de Schomberg, le principal aide de camp de Guillaume. Le nom de l'instrument vient effectivement du village de Lambeg, prés de Lisburn, où l'on sait que Guillaume d'Orange est passé, en route pour la bataille de la Boyne. Mais il est tout aussi possible que le premier tambour Lambeg ait été construit pour la bataille de Diamond, un siècle plus tard, en septembre 1795. C'est à l'issue de cette bataille que fut fondé l'Ordre d'Orange et c'est depuis cette époque que l'instrument est particulièrement associé à la musique des défilés, protestants ou catholiques. Lord Gosford, de Markethill, écrivait en 1796 au Lord Lieutenant Lord Camdem, resté à Dublin, ce qu'il avait vu dans le comté d'Armagh : "J'ai l'honneur de porter à la connaissance de votre excellence que le rassemblement des Orangistes s'est déroulé dans plusieurs parties de ce comté. L'un d'entre eux, consistant en 30 compagnies avec bannières, etc. après avoir défilé dans Portadown, Loughgall et Richhill, est venu ici. Il disposait d'un tambour et chaque compagnie avait un fifre et deux ou trois hommes à l'avant portant une baguette peinte et faisant office de commandant"[17].
D'un diamètre d'environ 1 mètre et pesant approximativement 20 kilos, il connut un essor très net dans les années 1870, en particulier dans le comté d'Armagh, mais encore une fois sans distinction de conviction religieuse. Jusqu'au milieu du XXe siècle, ces tambours étaient couramment utilisés par la Gaelic Athletics Organisation ou le Ancient Order of Hibernians (fondé à New York en 1830 comme équivalent protestant du Orange Order) et les vols d'instruments entre groupes de religion différentes n'étaient pas inconnus. Dans le meilleur des cas cependant, les musiciens se prêtaient les instruments, un changement de peau suffisant à en changer l'identité.
Dans les années 1930 et 1940, l'âge d'or pour les nostalgiques, on pouvait rencontrer plusieurs centaines de joueurs de Lambeg lors des rassemblements par comté ; ce chiffre a aujourd'hui été divisé par quatre, sans doute en raison de l'intérêt musical limité de l'instrument. Des compétitions sont pourtant organisées de façon très régulière et plusieurs dizaines de musiciens y participent.
Le fifre est également l'emblème des défilés orangistes, en particulier depuis les premières productions massives de flûtes traversières à destination d’un public d’amateurs dans les années 1920. Cette petite flûte traversière apparut en Angleterre au XVIe siècle et fut utilisée dans l'armée britannique jusqu'à la fin du XVIIe siècle, lorsqu'elle fut remplacée dans les orchestres militaires par les cuivres, plus puissants. Très proche de la flûte piccolo, elle est utilisée depuis le XIXe siècle dans les 'Fife and Drum bands' propres à l'Irlande du Nord.

Sur le plan institutionnel, la musique fut longtemps considérée comme un simple supplément d'âme peu pertinent. Les radios furent légitimement les premières à s'en préoccuper, dès 1924 à la BBC Northern Ireland, avec des animateurs réputés comme Sam Henry. A partir de 1947, grâce à Brian George puis plus tard à Seán O'Boyle, la BBC Northern Ireland commença à enregistrer de façon plus méthodique les musiciens irlandais et le uilleann piper Séamus Ennis anima de 1951 à 1960 l'une des émissions les plus célèbres de l'époque, As I Roved Out. La particularité de l'Irlande du Nord, les marching bands, fut également été présentée durant les années 1950 et 1960 dans Ulster Band.
Les premiers efforts en matière de publication phonographique sont cependant à mettre au seul crédit de deux organisations non-gouvernementales et apolitiques et basées dans le Sud :
- Gael-Linn, fondée en 1953 à Dublin, qui fit faire son entrée dans le monde du microsillon à la musique traditionnelle irlandaise. Elle est représentée en Irlande du Nord par son bureau situé à Armagh, ainsi que par environ 300 membres actifs. Son activité tourne essentiellement autour de la langue gaélique, et elle est de ce fait clairement identifiée comme pro-catholique.
- les catholiques forment également l’écrasante majorité des classes d’instruments organisées au Nord par le Comhaltas Ceoltóirí Éireann, fondé en 1951 à Mullingar, Co. Westmeath. En effet, si l'association prêche officiellement un strict apolitisme et une indépendance religieuse totale, certains de ses membres (comme Labhrás Ó Murchú du Fianna Fáil) furent officiellement soutenus par l'organisation lors d'élections, à grand renfort de publicités dans les colonnes de leur magazine Treoir. De même, la loi sur l'avortement fut âprement combattue dans ses mêmes colonnes en 1983.

Beaucoup plus indépendante, la Irish Traditional Music Archive est subventionnée conjointement par le Arts Council de la République et par le Arts Council of Northern Ireland, qui finance par ailleurs de nombreuses autres activités grâce à la Loterie nationale, des Pipe Bands aux clubs folks en passant par des compétitions de danse ou des festivals. Mêmes les Marching Bands, longtemps exclus des possibilités de subventionnements, le sont depuis 2001.
L'une des ses principales actions a également été le développement dans toutes les écoles d'Irlande du Nord de nouveaux programmes grâce auquel les enfants sont familiarisés avec la musique traditionnelle.
Cette volonté était confrontée à deux obstacles : d'une part, faire accepter la musique traditionnelle comme sujet d'étude, problème inhérent à de nombreux pays occidentaux ; et dans un deuxième temps, illustrer le fait que la musique irlandaise n'est pas le bien d'une seule composante de cette société nord-irlandaise. Jusque dans les années 1950, il était d'ailleurs relativement aisé pour les écoles publiques qui le souhaitait de ne pas proposer l'étude de la musique irlandaise, face à des écoles catholiques qui la proposait comme affirmation de leur "irlandicité".
En 1950, la musique irlandaise réussit à se frayer un chemin dans les programmes scolaires en profitant de l'ouverture faite aux musiques ethniques (rebaptisées comiquement World Music dans les années 1990). Pour la première fois, des enfants pouvaient jouer et mettre sur un pied d'égalité une pièce traditionnelle et une œuvre classique. Depuis le début des années 1990, l'une des clés de voûte de ce projet s'intitule "Education for Mutual Understanding", et est intervenu à travers des programmes comme Jigtime ou Different Drums dans des centaines d'écoles où les enfants sont amenés à parler et à réfléchir sur le contexte musical en Irlande du Nord, les ballades, les fife and drum bands, les hymnes nationaux, etc.
Dans ce contexte il est probable qu'on leur traduira les paroles de l'hymne national de la République d'Irlande, Amhrán na bhFiann (“ La Chanson du Soldat ”), fortement imprégné de valeurs guerrières : “ Seo dhibh a cháirde duan Óglaigh [Voici une chanson de soldat] (...) Is fonnmhar faobhrach sinn chun gleo [Nous sommes avides de batailles](...) Ba bhuachach ár sinsir romhainn [Nos ancêtres ont combattu avant nous](...) Ba dhúchas riamh d’ár gcine cháidh [Nous sommes à jamais une race de combattants] ”.
Une autre institution, plus discrète, intitulée Co-operation Ireland (autrefois Co-operation North), tente depuis 1979 de réconcilier les deux communautés en utilisant parfois le support musical : ainsi, le "Cross Border Choir" a enregistré son 1er CD en 2002 et des artistes de plusieurs pays ont publié sous son égide un CD intitulé "Respect".
Au niveau universitaire, la section d’ethnomusicologie (département d’anthropologie sociale) de Queen's University, longtemps dirigée par John Blacking à Belfast, consacre une petite partie de ses recherches à la musique traditionnelle irlandaise. Curieusement, un grand nombre de musiciens irlandais de Belfast viennent cependant poursuivre leurs études à Cork ou à Limerick.

Une association tente également de défendre les protestants face à ce qu'elle appelle une "menace permanente contre [son] identité culturelle" : la Ulster Bands Association passe pourtant pour un groupe modéré et tente d'affirmer son indépendance politique depuis sa création en mars 1998 : son but est essentiellement d'attirer l'attention du public et des responsables politiques sur les "Marching Bands", les traditions qui y sont liées et les injustices qu'ils subissent.

On l'aura compris, la distinction entre d'hypothétiques traditions au sein de la société nord-irlandaise s'est, comme dans de nombreux domaines, opéré progressivement à partir des années 1970. Cette théorie culturelle séparatiste, en certains points digne de l'apartheid, est en réalité un mythe créé et entretenu par les politiciens des deux confessions.
La première utilisation politique de la musique se produisit en août 1969 à (London)Derry lorsque des militants catholiques créèrent un festival de musique, surnommé le Bogside Fleadh Cheoil d'après le quartier de la ville dans lequel il se situait. Des musiciens venus spontanément de toute l'Irlande participèrent à cette édition unique. Puis en août 1971 l'association Comhaltas Ceoltóirí Éireann, dont nous avons indiqué le caractère officiellement apolitique, annula toutes les compétitions du Fleadh Cheoil (festival de compétitions rassemblant chaque année 70 000 personnes) en signe de protestation contre l'internement des nationalistes en Irlande du Nord. Ce tournant radical suscita une polémique extrêmement vive et associa sans doute définitivement la musique au républicanisme irlandais.
D'autres musiciens participèrent également à ce mouvement : les répertoires de groupes ou de personnalités comme les Wolfe Tones, les Dubliners, Christy Moore, Moving Hearts, les Pogues, etc. en portent nettement la trace.
On se souviendra également que quelques musiciens issus de principaux groupes des années 1970 (en particulier Planxty et The Bothy Band) se retrouvèrent en 1981 pour le "H-Block Project" et publièrent un album dont les fonds furent versés aux familles des prisonniers politiques de l'IRA en grève de la faim.

Comme la langue gaélique et les sports gaéliques quelques décennies avant elle, la musique irlandaise est devenue en une trentaine d'années un vecteur militant qui lui a donné ses titres de noblesse pour certains, mais qui la rend profondément antipathique pour d'autres. Certains protestants ont donc fini par croire à cette théorie des cultures séparées. Les plus extrémistes d'entre eux trouvent là une nouvelle façon de se définir a contrario pour mieux se rattacher à la culture britannique.
Cette vision d'un pays culturellement coupé en deux se trouve malheureusement renforcée par les hommes politiques eux-mêmes, comme en témoigne le discours de Bill Clinton cité en introduction. Les catholiques, peut-être poussés par ce sentiment venu des Etats-Unis, finissent eux-mêmes par croire à la supériorité de leur culture, vendus à des millions d'exemplaires dans le monde et se trémoussant sur toutes les scènes du globe.
Dans cette perspective, tout le monde est satisfait, tout le monde trouve son compte et chacun reste chez soi. Mais la réalité est tout autre.

Si l'on revient quelques instants sur les questions posées en introduction, on constate que non seulement les traditions musicales d'Irlande du Nord n'ont jamais connu de développement séparé, mais en outre qu'il est tout à fait ridicule de comparer, comme cela se produit souvent, la "joyeuse musique celtique" et la "musique martiale des 'Marching Bands'" : les catholiques ont aussi leur musique martiale, et les protestants leurs excellents fiddlers. Et c'est justement cette absence de différence qui peut présenter un danger, car la volonté de se différencier existe et doit alors se fonder sur des éléments artificiels, l'homme étant une "machine à fabriquer de la différence"

Une nouvelle fois on constate que la question posée ici, et sur laquelle repose toute identification, est une question de définition de la musique traditionnelle irlandaise. Il ne sera bien sûr pas question de délimiter une "musique d'Ulster", mais plutôt de reconnaître que la musique dans le Nord de l'Irlande revêt un caractère particulier : fusion passionnante de traditions écossaises, irlandaises et anglaises, elle n'en est pas moins pleinement irlandaise et fut longtemps l'un des rares symboles d'une intégration réussie, jusqu'au milieu du XXe siècle.

En Irlande du Nord comme sur toute l'île, il serait cependant vain de vouloir réduire l’univers de la musique traditionnelle irlandaise à une seule définition. Les pratiques culturelles respectives des protestants et des catholiques ne sont plus aussi monolithiques que par le passé. Etre un Irlandais catholique, que ce soit au sud ou au nord de la frontière, ne signifie plus nécessairement correspondre à l'image d'Epinal envisagée au sortir de la guerre civile pour forger l'unité du pays. De même, être un Irlandais protestant ne signifie plus nécessairement rejeter un pays voisin confusément retenu par des habitudes sociales et économiques anachroniques.
Jouer de la musique traditionnelle irlandaise ne signifie plus inévitablement jouer selon les canons établis par et pour les concours de musiciens au sein d'une association apolitique conservatrice de droite. Cette musique recouvre aujourd'hui un très grand nombre de réalités différentes. Elle peut être aussi bien de l’instrumental que du chant, de la chanson d’amour ou de la chanson militante, elle peut-être jouée pour des danseurs ou indépendamment, en jeans ou en queue de pie, à Knocknagree ou au Carnegie Hall, avec une cornemuse ou un bouzouki, en groupe ou en solo, à l'unisson ou avec des arrangements, elle peut être rurale ou urbaine, en anglais ou en irlandais, d'auteur connu ou inconnu, etc.
Il n’y a donc pas de définition unique de la musique irlandaise, pas plus qu’il y a une seule façon d'en faire, et pas plus qu’il y a une seule façon d’être irlandais, d'être catholique ou protestant. On peut enfin espérer qu'en ces temps d'afflux d'immigrants vers l'Irlande on pourra non seulement envisager des Irlandais catholiques et des Irlandais protestants, mais également des Irlandais athées, des Irlandais musulmans, des Irlandais juifs, des Irlandais bouddhistes, etc.

[1] Il s'agit de la harpe de la Reine Marie (dite Harpe de Lude) et de la harpe Lamont. Elles ressemblent d'ailleurs énormément à la célèbre harpe de Trinity College, symbole officiel de l'Irlande, qui pourrait être le fruit d'un luthier écossais.
[2] Robinson, P., The Plantation of Ulster, Belfast, Ulster Historical Foundation, 1984, p. 105.
[3] Cité par Brennan Helen, The Story of Irish Dancing, Dingle, Brandon, 1999, p. 121.
[4] The 'Northern Star, N° 57, 1792. Il convient de noter que le Northern Star bénéficiait d'un tirage d'environ 5000 exemplaires (soit davantage que The Times à Londres) et que chaque exemplaire était lu par plusieurs dizaines de personnes, selon Curtin Nancy, The United Irishmen: Popular Politics in Ulster and Dublin, 1791-1798, Clarendon Press, 1998, p176-8. La proportion d'illettrés parmi la population d'Irlande du Nord était ainsi l'une des plus basses d'Europe, soit moins de 25% selon Whelan Kevin, The Tree of Liberty, Radicalism, Catholicism and the Construction of Irish Identity 1760 - 1830, University of Notre Dame, 1997, p. 66.
[5] “ Some citizens of Belfast (...) propose to open a subscription which they intend to apply in attempting to revive and perpetuate the ancient music and poetry of Ireland. They are solicitous to preserve from oblivion the few fragments which have been permitted to remain as the monuments of the refined taste and genius of our ancestors.(...) When it is considered how intimately the spirit and character of a people are connected with their national poetry and music, it is presumed the Irish patriot and politician will not deem it an object unworthy of his patronage and protection ”. Conclusion du prospectus de la Belfast Harp Society appelant au soutien à un grand festival de harpes, 1791, cité par Francis O’NEILL, Irish Minstrels and Musicians, op. cit., 1987 (1ère éd. 1913), p. 84, cité par FERGUSON Lady, Sir Samuel Ferguson and the Ireland of his Day, Edimbourg & Londres, W. Blackwood, 1896, Vol. 1, p. 48, cité par Patrick RAFROIDI, L’Irlande et le Romantisme, Lille, Presses Universitaires de Lille, 1972, pp. 228-229.
[6] “ Thus, many of the Ballads [of The Nation] are in the imperative, such as “ Bide your Time ” and “ Be Patient ”, or a ballad would have a moral to it, such as “ Aid Yourself and God will Aid You ”. Here, The Nation is talking down to, rather than singing with the people, and we are conscious of its implicit feeling of superiority (...). The historical ballads of the Nation were also written with a very definite aim in mind, and quite often the teaching of the lesson was more important than the telling of the story ”. Desmond KENNY, “ The Ballads of The Nation ”, op. cit., 1978, p. 43.
[7] “ The ballads of the Nation are an important part of the official nationalist balladry in Ireland to-day. They form an integral part of every parading band’s repertoire, and one of them, “ A Nation Once Again ” was very nearly adopted as the national anthem. They are taught in the schools as the great songs of our nationalist tradition, and, even yet, few ballad sessions do not include at least one of them ”. Desmond KENNY, “ The Ballads of The Nation ”, op. cit., 1978, p. 32, article que l’on pourra consulter pour tout ce qui concerne ce chapitre. Voir également une compilation des chansons les plus appréciées par le public parue en 1845 et rééditée récemment, “ The Spirit of The Nation ”, Dublin, Gilbert Dalton, 1981 (1ère éd. 1845), 347 p.
[8] Un "meeting" doit être pris ici au sens de cérémonie presbytérienne. Merci à John Moulden pour cette remarque.
[9] Selon Brendan Behan, Lilliburlero pourrait être une déformation du gaélique "An Lile ba léir é ba linn an lá", 'The lily was clear, the day was ours', référence à 1641 lorsque les Irlandais symbolisés par le muguet (lily) vainquirent les colons protestants.
[10] Oyediran, J., 'The United Kingdom's Compliance with Article 4 of the International Convention on the Elimination of all Forms of Racial Discrimination' in Coliver, S. (dir.), Striking a Balance, University of Essex, 1992, p. 249.
[11] “ The Men Behind the Wire ”, Outlet Records, RCL 3001, 1971. Pour tout ce qui concerne la discographie de cette période, voir l’article de Richard DEUTSCH, “ Sélection Discographique des Ballades Inspirées par les Evénements d’Irlande du Nord : 1968-1974 ”, Etudes Irlandaises, 1ère série, N° 3, 1974, pp. 75-80. On retrouvera une description de cet univers dans la pièce de Stewart PARKER, Catch Penny Twist, Gallery Books, Dublin, N° 56, 1980, 72 p.
[12] “ The Irish love to sing. (...) Sadly, this latter delight in communal singing has been much exploited in recent times by politically motivated singers (...) - jingoistic ‘rebel songs’ for barstool patriots - have unfortunately come to represent Irish singing to the more casual listener ”. Ron KAVANA, notes de pochette du disque “ Hurry the Jug ”, Irish Globestyle, CDORBD 090, 1995, p. 2.
[13] Citées par Cooper David, "On the Twelfth of July in the Morning . . . or the Man who Mistook his Sash for a Hat', Folk Music Journal, Vol. 8, Number 1, 2001, pp. 67-89.
[14] "As far as we're concerned, we feel that there has been a failure to recognise that there are two ethnic traditions (...) and I feel that a mistake has been made in that we have been talking about Irish traditional music. (...)once you recognise there are two ethnic traditions, that there is music which is solely peculiar to those traditions, then the task is to find common ground between the two musical traditions and concentrate on that. But you can't force it all into one tradition. McNamee Peter, Traditional Music: Whose Music?, Belfast, Institute of Irish Studies, 1992, p. 89.
[15] The skeletons of many of the so called 'Orange' tunes resemble those in the so-called 'Green' family cupboard. 'The Boyne Water' is precisely the same tune as 'Rosc Catha na Mumhan' (The Battle-cry of Munster), alternatively known as 'Marchechaid na Buinne' ['the cavalcade of the Boyne']. Tunes, of themselves, have no ideological message, and what constitutes a 'party' tune depends on verbal labels and the perception of the hearer. Ciarán Carson, Last Night's Fun, Pimlico, Londres, 1997.
[16] “ Jim O’Neill was aged 27 ; a weaver with Parnell side-whiskers, Gaelic football supporter and a drummer in the village band. Although himself a Republican, he learned many of his songs from his local publican, who was a staunch Orange man and master of the Lambeg Drums ”. Peter KENNEDY, notes pour l’album “ Traditional Songs of Ireland ”, Saydisc CD-SDL 411, 1995, p. 6.
[17] "I have the honour to acquaint your excellency that the meeting of Orangemen took place in different parts of this county. One party, consisting Of 30 companies with banners etc'., after parading through Portadown, Loughgall, and Richhill came towards this place. the party had one drum and each company had a fife and two or three men in front with painted wands in their hands who acted as commanders."

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