Assemblée nationale
COMPTE RENDU
ANALYTIQUE OFFICIEL
3ème SÉANCE DU MARDI 29 JUIN 1999
Projet de loi sur les NUISANCES SONORES AÉROPORTUAIRES (Procédure
d'examen simplifiée)
L'ordre du jour appelle la deuxième lecture du projet de loi
portant création de l'autorité de contrôle des nuisances
sonores
aéroportuaires.
M. le Président - Je rappelle que la discussion fait l'objet
d'une procédure d'examen simplifiée.
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports
et du logement - Ce projet est très attendu.
Comme vous le savez, je me suis attaché à créer
les conditions favorables au développement du transport aérien
dans notre pays.
La construction des pistes de Roissy, l'ouverture du capital de la
compagnie nationale Air France, les mesures prises pour enrayer le
déclin d'Orly participent du même objectif : développer
l'activité économique et l'emploi que génère
le transport aérien, en prenant en compte l'environnement
des riverains. C'est pour nous un choix de société.
Pour donner toute garantie à l'ensemble des partenaires, en
particulier aux riverains, j'ai souhaité qu'une instance indépendante
puisse contrôler l'ensemble des dispositions de lutte contre les
nuisances sonores.
Au cours de la première lecture, vous avez contribué
à renforcer le dispositif proposé par le Gouvernement. A
ce titre, l'action de M. le rapporteur a été déterminante.
Le changement de dénomination de l'Autorité en ACNUSA
-Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires-
s'est accompagné d'une composition élargie et d'un pouvoir
étendu.
C'est maintenant à l'Autorité que revient le pouvoir
d'établir des amendes administratives, sur proposition de la commission
nationale de prévention des nuisances sonores. Le montant maximal
des amendes a été relevé.
S'agissant, ensuite, des commissions consultatives de l'environnement,
vous avez également étendu leurs missions et leur pouvoir
de consultation, en particulier sur les grands aérodromes où
existe un dispositif d'aide à l'insonorisation des riverains.
Cette commission sera notamment dotée d'une instance permanente
de travail, le comité permanent. Il lui est conféré
un pouvoir de saisine de l'Autorité indépendante.
Enfin, quant à l'urbanisme, l'extension des plans d'exposition
au bruit à une quatrième zone dans laquelle une insonorisation
des constructions nouvelles serait exigée me paraît aller
dans la bonne direction.
Admettant la nécessité d'étoffer les pouvoirs
de l'Autorité, le Sénat s'est rallié dans une large
mesure à ces dispositions, en précisant la rédaction
de quelques unes d'entre elles.
Je constate avec satisfaction la volonté commune de progresser,
face à une exigence unanimement reconnue.
Je voudrais féliciter votre rapporteur pour la qualité
de son travail et vous remercier de l'esprit constructif du travail en
commission qui traduit -me semble-t-il- la proximité des points
de vue entre l'Assemblée et le Sénat.
Je souhaite maintenant que l'autorité indépendante puisse
être mise en place dès l'automne : c'est un temps considérable
qui serait gagné au bénéfice des riverains.
Certes le texte pourrait être encore amélioré, mais
parfois le mieux est l'ennemi du bien.
L'objectif est maintenant que nous apportions, le plus rapidement possible,
aux citoyens habitant à proximité des aérodromes
des garanties quant à la préservation de leurs droits, tout
en permettant le développement économique des plates-formes
aéroportuaires (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste
et du groupe socialiste).
M. Jean-Pierre Blazy, rapporteur de la commission de la production
et des échanges - Par le vote de ce soir, nous allons mettre
en place la première autorité administrative indépendante
dans le domaine de l'environnement, l'ACNUSA.
Un travail important a été effectué en première
lecture par notre Assemblée, consciente de l'exigence environnementale.
Nous avons souhaité faire de cette Autorité un réel
acteur de la lutte contre les nuisances sonores.
Ainsi, son indépendance a été renforcée
par un encadrement strict des aptitudes de ses membres et par la diversification
de leurs compétences. Le président devra occuper son
poste à plein temps et la diversité de l'origine des experts
garantira leur impartialité.
L'Assemblée a confié à l'ACNUSA des pouvoirs importants,
qui permettent de "crédibiliser" le dispositif et de créer
une réelle attente de la part des acteurs mais aussi des élus
et des riverains. L'Autorité a ainsi été investie
d'un pouvoir de recommandation, dont la saisine a été
élargie aux CCE et aux associations agréées de protection
de l'environnement sur toute question relative à la mesure du
bruit, ce qui inclut la définition des indices de mesure de la gêne
sonore, et sur toute question relative à la maîtrise et à
la limitation de l'impact environnemental des nuisances sonores liées
à l'activité aéroportuaire. En outre l'Autorité
sera obligatoirement consultée sur les plans d'exposition
au bruit -définis par la loi de 1985- les PGS -définis par
la loi de 1992-, les projets de textes réglementaires relatifs
à l'environnement des aéroports, sur les projets d'élaboration
ou de modification des procédures de départ, d'attente et
d'approche aux instruments ainsi que sur les valeurs maximales de bruit.
L'ACNUSA est également investie d'un pouvoir réglementaire
de définition des prescriptions applicables aux stations de
mesure du bruit dans les neuf plus grands aéroports français.
Elle exercera un pouvoir de contrôle et une mission d'information.
Elle s'assurera que les exploitants d'aérodromes respectent
les prescriptions qu'elle a définies dans le cadre de son pouvoir
réglementaire. Par ailleurs, elle contrôlera le respect des
engagements pris en vue de réduire les nuisances sonores. Le rapport
qu'elle rendra public chaque année constituera un élément
important de la transparence du dispositif. En outre, l'Autorité
établira un programme de diffusion de l'information.
Elle disposera d'un pouvoir d'arbitrage en cas de désaccord
sur le respect des engagements pris par les différentes parties
lors de l'élaboration d'une charte de qualité de l'environnement
sonore aéroportuaire.
Enfin, elle se verra dotée d'un pouvoir de sanction qui lui
donne un rôle de "juge de paix" et une réelle crédibilité.
Ce pouvoir, qui avait été assorti d'un doublement des
amendes infligées aux responsables d'infraction, a permis de lever
de façon définitive les doutes sur la transparence
du dispositif de sanction.
Le dispositif est à deux étages. L'Assemblée a
souhaité renforcer la présence des riverains et les attributions
ainsi que les moyens de fonctionnement des commissions consultatives
de l'environnement. Dorénavant, les commissions consultatives d'aides
aux riverains y seront intégrées au travers d'un comité
permanent, qui permettra de garantir leur bon fonctionnement. En outre,
la composition des CCE a été révisée
: les riverains comme les élus seront représentés
à hauteur d'un tiers chacun, les acteurs de l'activité
aéroportuaire disposeront du dernier tiers. De plus, la commission
se réunira de droit à la demande d'au moins un tiers des
membres.
L'Assemblée a également renforcé les interdictions
et restrictions relatives aux vols d'hélicoptères au-dessus
des zones densément peuplées.
En matière d'urbanisme, elle a souhaité l'assouplissement
des prescriptions en matière de constructivité dans la zone
C des PEB, afin d'éviter le dépérissement de
villes situées dans ces zones, sans toutefois permettre un accroissement
du nombre d'habitants subissant des nuisances de plus en plus importantes.
Enfin, une quatrième zone de PEB a été instaurée
à l'intérieur de laquelle les constructions sont autorisées
mais doivent faire l'objet de mesures d'isolation acoustique. A cet égard,
je réitère ma demande d'une harmonisation des PEB et
des PGS dans les délais les plus brefs, et je souhaiterais avoir
des précisions quant au calendrier et aux modalités
qu'il serait possible de définir.
Conscients de la nécessité que ce texte trouve une conclusion
législative rapide du fait de l'urgence de l'introduction de ce
nouvel acteur dans le ciel français, nous avons entrepris, avec
le rapporteur du Sénat, de parfaire le texte issu de nos rangs en
intégrant les engagements concernant un certain nombre d'éléments
pertinents qui avaient été présentés en première
lecture mais qui nécessitaient d'être approfondis. Le
Sénat a donc repris en deuxième lecture le texte issu de
l'Assemblée.
Ainsi, le nombre de membres passe de 7 à 8, même si, Monsieur
le ministre, vous aviez accepté le principe de 9 membres,
donnant alors satisfaction au souhait de M. Cochet : un expert en gêne
sonore et un expert en navigation aérienne ont été
prévus, tandis que l'expert en urbanisme a été
sacrifié sur l'autel de la sagesse sénatoriale.
Je me félicite qu'un amendement sénatorial permet à
toute association, agréée ou non, concernée par l'environnement
sonore aéroportuaire de saisir directement l'ACNUSA. Il s'agit d'un
progrès incontestable.
Un amendement du Gouvernement a étendu le pouvoir de sanction
à l'ensemble des aéroports français, suivant ainsi
la volonté de l'Assemblée de voir être mis en
place un dispositif cohérent.
Deux interrogations demeurent. Le dispositif actuel de sanction continuera-t-il
bien à s'appliquer jusqu'à la mise en place de l'ACNUSA ?
Le décret en Conseil d'Etat qui permettra de créer la nouvelle
CNPN sera-t-il bien publié dans un délai de six mois
? Nous serons vigilants sur ce point : il convient en effet de corriger
les dysfonctionnements de cette instance et de restaurer sa crédibilité.
Le Sénat a abaissé à 80 000 F le montant maximal
des sanctions : je me rallie à cette proposition. C'est tout de
même dix fois plus qu'à Manchester ! Mais il serait
bon que, comme au Royaume-Uni, le produit des sanctions soit versé
à un fonds d'aide aux riverains.
Le Sénat a aussi renforcé le régime des responsabilités
et précisé le contenu du rapport public qui devra informer
sur les sanctions. Il a estimé inutile de préciser
que les associations avaient "qualité d'expert". Monsieur le ministre,
pouvez-vous nous confirmer que les associations concernées
par l'environnement sonore aéroportuaire ont vocation à être
retenues lors d'un appel d'offres en vue d'une expertise ? De même,
conformément à l'engagement que j'avais pris, toute personne
concernée pourra également être entendue par
la commission consultative de l'environnement.
Le Sénat a cru utile de préciser que le dernier tiers
de cette commission serait constitué de représentants d'associations
de riverains et d'associations concernées de protection de
l'environnement et du cadre de vie. Cet ajout n'est pas dénué
de risques. En effet, sur un tout petit aérodrome, il est
possible qu'il n'existe pas d'association de riverains à proprement
parler. Entend-on ce terme de façon assez large pour qu'il
soit possible dans tous les cas de constituer une CCE ?
Le Sénat a voté l'article trois en des termes identiques.
Concernant la quatrième zone de PEB, il a rétabli la
proposition originelle de l'Assemblée : cette zone est de droit
pour les neuf plus grands aéroports et reste une possibilité
pour les autres.
Enfin; le Sénat a introduit deux dispositions a priori difficilement
applicables, voire inapplicables.
La première autorise la construction d'immeubles collectifs
en zone C à condition qu'elle s'accompagne dans un délai
d'un an d'une réduction équivalente de la capacité
d'accueil dans la même zone. Monsieur le ministre, si la mesure se
révèle en effet inapplicable, la modifierez-vous dans
le projet de loi relatif à l'urbanisme et aux déplacements
que nous devons examiner début 2000 ? Deux écueils
devront être évités. D'une part, provoquer le dépérissement
des bourgs situés en zone C ; d'autre part, accroître le nombre
de personnes subissant les nuisances. Il faudra aider les communes à
surmonter ces difficultés, notamment sur le plan financier.
Quant à l'obligation d'informer les locataires de biens immobiliers
situés dans une zone de PEB, c'est assurément une idée
qui part d'un bon sentiment. Mais la disposition paraît difficilement
inapplicable.
Dans le souci d'aboutir rapidement, je vous propose de voter le texte
conforme à celui adopté par le Sénat. L'attente est
forte sur le terrain et la création de l'ACNVSA marquera une
étape importante dans l'histoire de la politique aéroportuaire
française.
Monsieur le ministre, vous vous étiez engagé en première
lecture à l'Assemblée puis de nouveau au Sénat à
étendre à Orly et aux principaux aéroports de
province les mesures, destinées à préserver la qualité
de vie des riverains, expérimentées à Roissy. Pouvez-vous
nous donner des précisions sur le calendrier et les modalités
de cette extension ?
En effet, si 80 % des mouvements aériens sont actuellement réalisés
par des appareils les moins bruyants, plusieurs centaines de milliers
de riverains d'aérodromes civils et militaires ont à se plaindre
d'un bruit excessif de jour comme de nuit. Si les avions les plus
bruyants, dits de chapitre deux, ainsi que les avions de chapitre 3 Hushkité
seront totalement retirés du trafic le 1er avril 2002, la
gêne provoquée par l'augmentation du trafic est subie le jour
et le plus souvent la nuit. En réalité, si l'énergie
sonore globale a diminué au-dessus de Roissy, les nuisances augmentent
cependant. Les riverains attendent des solutions.
L'ACNUSA devrait être un excellent outil. Le fait qu'elle soit
la première autorité administrative indépendante en
matière d'environnement lui confère une lourde responsabilité.
Elle aura à relever un défi de taille face à l'ampleur
de ses missions et à l'espoir qu'elle suscite déjà.
En votant ce texte attendu, nous concrétisons la recherche d'un
développement aéroportuaire respectueux de la qualité
de l'environnement et du développement durable (Applaudissements
sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe
RCV).
M. Félix Leyzour - La philosophie générale de
ce texte donne satisfaction aux députés communistes.
La création d'une Autorité de contrôle des nuisances
sonores aéroportuaires permettra de renouer le dialogue entre les
autorités aéroportuaires et les riverains d'aéroports.
Elle mettra fin à la position hégémonique de l'autorité
gestionnaire qui était jusque là juge et partie. Elle
permettra aussi de renforcer la concertation entre les différents
acteurs du transport aérien. Nous avions souligné en
première lecture la nécessité de supprimer le terme
"régulation" dans le nom donné à cette Autorité.
Cette notion, introduite par le Sénat, diluait en effet l'objet
essentiel de l'action de l'Autorité, qui consiste à contrôler
les nuisances sonores. L'Assemblée nous a suivis et le Sénat,
en deuxième lecture, n'est pas revenu sur cette modification. Nous
estimons essentiel que le Gouvernement ne soit pas dessaisi de ses
pouvoirs au détriment d'une Autorité sans responsabilité
politique.
Nous avions également déposé deux amendements
qui ont été adoptés par l'Assemblée. Ils tendaient
à prendre en compte la spécificité des vieux villages,
situés à proximité des aéroports. Nous regrettons
que le Sénat ait dénaturé le texte sur ce point.
Mon ami François Asensi a donc déposé des amendements
sur ces dispositions qui risqueraient de compromettre le devenir des
vieux bourgs.
Néanmoins, le Sénat ayant conservé dans une large
mesure le texte voté par l'Assemblée et n'ayant pas remis
en cause sa philosophie générale, le groupe communiste, soucieux
que l'Autorité soit mise en place dans les plus brefs délais,
votera ce texte (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).
M. Christian Martin - Ce texte, qui fait l'objet d'un large accord,
recueillera l'approbation du groupe UDF.
Il met en place, sur le modèle d'institutions telles que la
COB ou le CSA, une nouvelle autorité administrative indépendante
chargée du contrôle des nuisances sonores aériennes,
dotée d'un budget propre et d'un pouvoir de sanctions. Elle élaborera
également des prescriptions techniques et aura devoir d'informer
les riverains des neuf principaux aéroports du pays.
Cette Autorité sera composée de membres désignés
par les présidents de l'Assemblée et du Sénat, ainsi
que d'experts compétents en matière de bruit, d'aéronautique
et de santé. L'indépendance de ses membres sera garantie
par un mandat de six ans, non renouvelable, incompatible avec certaines
activités privées ou publiques, ainsi que par l'indemnisation
de leurs fonctions.
Parallèlement, le projet prévoit de renforcer le rôle
des commissions consultatives de l'environnement et de restreindre le trafic
d'hélicoptères dans les zones fortement peuplées.
En première lecture, notre assemblée a amendé
le texte sur plusieurs points. Elle a notamment modifié le nom de
l'Autorité ; prévu l'indemnisation de ses membres ;
étendu le droit de saisine de l'Autorité au ministre chargé
de l'urbanisme et aux associations agréées de protection
de l'environnement ; renforcé son pouvoir de mise en demeure des
exploitants et son pouvoir de sanctions ; étendu les prérogatives
de commissions consultatives de l'environnement ; interdit certains vols
d'hélicoptères au-dessus de zones densément
peuplées ; autorisé sous conditions, des constructions à
usage d'habitation dans les zones C des PEB et créé une
zone D dans les PEB où les constructions seront autorisées
à condition de faire l'objet d'une isolation acoustique.
Dans l'ensemble, le Sénat n'a que légèrement modifié
ce dispositif. Il a notamment porté de 7 à 8 le nombre des
membres de l'Autorité ; élargi le régime d'incompatibilité
des membres de l'Autorité, étendu à tout titulaire
d'un mandat électif ; prévu que toutes les associations
concernées, agréées ou non, puissent mettre en oeuvre
le droit de recommandation de l'Autorité ; étendu le
pouvoir de sanction de l'Autorité à l'ensemble des aérodromes
français ; fixé à 80 000 F le plafond des sanctions
applicables aux personnes morales ; amélioré la consultation
des riverains qui pourront être entendus, à leur demande,
par la CEE ou son comité permanent ; autorisé en zone
C des PEB les constructions si la capacité d'accueil dans des constructions
existantes dans la même zone est réduite à due
concurrence dans le délai d'un an ; créé une quatrième
zone de PEB, obligatoire pour les neuf aérodromes les plus
importants, facultative pour les autres.
Comme il convenait d'adopter rapidement un texte qui réponde
aux attentes légitimes des riverains, souci partagé par le
groupe UDF, le rapporteur s'est rallié au texte du Sénat.
La commission a donc adopté le texte sans modification.
Je souhaiterais toutefois appeler l'attention sur les nuisances sonores
consécutives à la création d'aérodromes, même
modestes, dans des zones considérées comme calmes.
M. le Président - Je vous prie de conclure.
M. Christian Martin - Je demande à M. le ministre de bien vouloir
répondre à mes questions, que je lui transmets par écrit...
Le groupe UDF votera ce projet.
M. Yves Cochet - Comme les riverains de Roissy - Charles-de-Gaulle,
qui attendent la création de l'ACNUSA depuis l'annonce regrettable
de la construction de deux pistes supplémentaires, les riverains
des autres aéroports, quelle que soit leur taille, supportent
de moins en moins l'augmentation du trafic. Il est donc nécessaire
d'adopter rapidement cette loi ; c'est pourquoi je n'ai pas déposé
de nouveaux amendements.
Je rappelle cependant que j'aurais souhaité des sanctions pénales
en cas de récidive d'infraction aux mesures de restrictions de
vol des avions, aux procédures particulières de décollage
ou d'atterrissage, aux règles relatives aux essais moteurs et aux
valeurs maximales de bruit à ne pas dépasser. Mon but
était de responsabiliser les compagnies qui auraient tendance à
préférer payer une amende administrative plutôt que
de respecter les règles. Je regrette que les sanctions administratives
aux personnes morales aient été réduites de 100 000
à 80 000 F.
Néanmoins, ce projet de retour du Sénat me paraît
assez satisfaisant : premièrement, la grande majorité des
amendements adoptés par l'Assemblée en première
lecture ont été conservés ; deuxièmement, le
Gouvernement a présenté plusieurs amendements, qui
ont été adoptés, et dont un étend à
l'ensemble des aéroports français l'application du dispositif
de sanctions ; enfin, un amendement donne la possibilité à
toute personne subissant les nuisances sonores résultant des trajectoires
de départ, d'attente et d'approche et non représentée
au sein de la commission consultative de l'environnement, d'être
entendue à sa demande par celle-ci ou son comité permanent.
Cependant, j'aimerais savoir s'il est bien entendu que les associations
"concernées par l'environnement aéroportuaire" sont des associations
locales, départementales ou nationales non riveraines d'un aéroport,
mais dont l'objet ou l'un des objets de travail concerne les problèmes
liés à l'environnement aéroportuaire.
Si cette précision est apportée, je ne verrai plus aucun
obstacle à mon vote favorable car ce projet, en dépit de
ses imperfections, constitue une étape importante. Je souhaite
que l'ACNUSA soit opérationnelle au 1er janvier 2000 ; ce serait
un symbole de l'entrée dans le monde du développement
durable.
M. Jean Marsaudon - L'examen de ce texte aura été marqué
par le pragmatisme et la concertation, qui honorent nos deux assemblées.
Le Sénat a apporté au texte des modifications qui complètent
judicieusement les dispositions initiales. Cependant je reste dubitatif
sur la nécessité de rendre obligatoire l'insertion dans les
contrats de location d'une clause informant le locataire que le bien est
situé dans une zone de bruit. L'autorité de contrôle
voit sa crédibilité définitivement établie.
Néanmoins je renouvelle ma surprise de constater que le régime
des incompatibilités concernerait toute personne détenant
des intérêts non seulement directs, mais également
indirects dans une entreprise des secteurs aéronautiques ou aéroportuaires.
La notion de "lien indirect" ne couperait-elle pas l'autorité de
contrôle d'un vivier de compétence et d'expertise ? Ne risque-t-on
pas d'en faire une simple émanation de la DGAC ?
Le développement aéroportuaire, l'aménagement
du territoire et l'environnement n'étaient pas nécessairement
voués à faire bon ménage, mais l'intérêt
général a su s'imposer et transcender les clivages traditionnels
ou partisans. Le groupe RPR apportera donc sans surprise son soutien
à ce projet.
Permettez-moi quand même, Monsieur le ministre, de vous interpeller
sur un sujet brûlant : quid du troisième aéroport ?
M. André Godin - La libéralisation du transport aérien
en Europe a entraîné le développement rapide de l'activité
des aéroports ; dans le même temps, une exigence forte
de la part des riverains s'est affirmée.
La législation existante ne pouvait subsister sans aboutir à
une impasse. Le recours déposé vendredi par l'association
des riverains de l'aéroport de Lyon-Satolas, l'ACENAS, devant
le tribunal administratif, contre une subvention du conseil régional
de Rhône-Alpes, destinée à l'amélioration
de la plate-forme, en est une récente illustration.
Véritablement indépendante, directement accessible aux
citoyens, dotée de réels moyens de contrôle et de sanctions,
l'ACNUSA correspond aux futurs outils de contrôle démocratique
du monde économique.
Je ne doute pas que ce projet augure une politique cohérente
des transports aériens, permettant tout à la fois l'essor
de ce secteur, le développement équilibré du
territoire et l'émergence d'un environnement respectueux de la quiétude
des riverains. Le groupe socialiste, bien entendu, le votera.
M. Francis Delattre - La création de cette Autorité de
contrôle résulte d'abord de l'incapacité d'Aéroport
de Paris à dialoguer avec les riverains et à prendre
certaines sanctions... Mais vous ne vous en tirerez pas à si bon
compte, Monsieur le ministre. De toute façon, tous les grands
aéroports internationaux disposent de structures équivalentes.
Mais le problème est ailleurs : il est dans l'augmentation du nombre
des mouvements d'avions, bien supérieure aux 4 ou 5 % prévus,
notamment à Roissy. Si vous voulez vous en tenir à
55 millions de passagers, il vous faudra rapidement prendre des décisions.
Mais avec quatre pistes, l'aéroport Charles-de-Gaulle sera bientôt
saturé et nous craignons qu'on ne prenne sur le tiers des réserves
foncières encore disponibles, ce qui rendra la situation intenable.
Nous avons été échaudés, par exemple, en
ce qui concerne les avions du chapitre II : on dit qu'il n'y en aurait
pratiquement plus, mais j'ai le regret de vous annoncer qu'ils continuent
de voler !
M. le Ministre - Ils auront disparu en 2002, conformément aux
prescriptions européennes.
M. Francis Delattre - Si l'on veut donner confiance aux riverains,
il faut cesser de leur raconter des histoires et annoncer rapidement
un plan pour l'élimination des appareils les plus polluants.
Se pose aussi la question du troisième aéroport. Pour
construire une telle plate-forme, il faut dix ans et l'on ne peut pas,
en toute certitude, détourner une partie du trafic vers les
aéroports
de province. Pour éviter de se trouver là aussi dans une
impasse, il faut encore des décisions.
Enfin, ne peut-on envisager pour Roissy la trêve de nuit qu'observent
tous les grands aéroports internationaux ?
M. le Ministre - La qualité de vie des riverains et le rôle
de la nouvelle autorité étant en jeu, je m'efforcerai de
vous répondre à tous précisément.
Monsieur le rapporteur, comme M. Asensi en première lecture,
vous avez posé le problème de la constructibilité
en zone C du PEB. Nous comptons mener sur chaque cas une analyse
démographique et urbanistique et cela concernera bien entendu le
pays de Tremblay-en-France. Les nouvelles dispositions de l'article 4,
précisées par le Sénat, devraient permettre de redynamiser
ces vieux bourgs, pour leur partie située en zone C, dans
la mesure où le bâti vétuste ne présenterait
pas de caractère historique. En effet, le Sénat a assoupli
les contraintes pesant sur ces zones exposées aux nuisances pourvu
que la capacité d'accueil n'y augmente pas à moyen
terme.
Le délai d'un an fixé à l'article 4 bis peut se
révéler peu propice à des opérations d'une
certaine ampleur, je le reconnais, et la précédente rédaction
de l'article 4 ne peut résoudre tous les problèmes. Cependant,
je m'engage à mener une réflexion approfondie en vue
de corriger éventuellement le dispositif, par exemple dans le cadre
de la loi sur l'habitat, l'urbanisme et les déplacements.
Je suis favorable à une harmonisation entre plans d'exposition
au bruit et plans de gênes sonores. Mme Voynet et moi-même
nous sommes engagés à réviser les règles d'établissement
de ces plans, pour tenir compte de la gêne réellement constatée.
Une requête est en cours de dépouillement : les résultats
en seront transmis à l'ACNUSA dès qu'elle sera installée.
Je remercie MM. Godin et Cochet de leur soutien et de leurs contributions.
Les associations susceptibles de saisir l'ACNUSA ou de siéger
à la commission de l'environnement sont, aux termes du projet, celles
qui travaillent à améliorer l'environnement des aéroports,
Monsieur Cochet. Quant à l'appel d'offres lancé par l'Autorité
pour expertise de l'environnement sonore, il va de soi que ces associations
pourront y répondre au même titre que les entreprises, puisque
l'Autorité devra appliquer le code des marchés publics.
Le projet transfère le pouvoir de sanction à l'ACNUSA
et cette disposition prendra effet dès que les membres de celle-ci
seront nommés. En attendant, le dispositif prévu par les
articles R. 226-1 à 226-6 du code de l'aviation civile reste en
vigueur et le ministre peut donc continuer à prononcer des
amendes.
Monsieur Leyzour, j'ai refusé un amendement qui tendait à
autoriser l'ACNUSA à édicter des normes de bruit car j'estime
comme vous qu'il appartient de ne pas dessaisir le pouvoir politique de
ses responsabilités.
Monsieur Martin, je vous remercie de votre soutien et de l'attention
que vous avez apportée à cette loi. Pour régler le
problème des vols d'entraînement de l'armée de
l'air et des vols d'entraînement à la voltige, il convient
avant tout de créer des commissions consultatives de l'environnement
pour ouvrir la discussion. Déjà, les services locaux de l'aviation
civile se sont entendu avec leurs homologues civils pour éloigner
la quasi-totalité des survols militaires.
Enfin, le ministère de l'environnement subventionne les aéro-clubs
ayant signé une charte de l'environnement pour les aides à
installer des silencieux et à modifier les hélices sur leurs
petits avions.
Messieurs Marsaudon et Delattre, je suis très attentif à
l'évolution du trafic aérien. Et lorsque je déclare
que nous avons fixé pour Roissy la limite à 55 millions
de passagers, veuillez croire qu'il ne s'agit pas d'une formule creuse.
C'est un engagement que j'entends tenir ! De même en ce qui
concerne la limitation à 255 000 créneaux pour Orly. Ces
limites devant être atteintes dans dix ou quinze ans, nous
ne voulons pas perdre de temps. Mme Voynet et moi-même avons donc
donné au président du comité interministériel
des schémas de service de transport mission d'étudier ces
dossiers afin que décision de construire éventuellement un
troisième aéroport puisse être prise dès
cette année.
M. le Président - En application de l'article 91, alinéa
9, du Règlement, j'appelle maintenant, dans le texte du Sénat,
l'article du projet de loi sur lequel les deux Assemblées
du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique et qui fait
l'objet d'amendements.
ART. 4 bis
M. François Asensi - Je crains d'aller contre un bel unanimisme
mais, en première lecture, l'Assemblée avait pris en compte
la spécificité des vieux villages situés à
proximité de Roissy. Pressé d'obtenir un vote conforme, le
Gouvernement a, à mon regret, accepté le texte du Sénat,
qui dénaturait les dispositions que nous avions adoptées.
Ces villages sont un lieu de vie, ils ont un passé historique
et un patrimoine architectural. Mais sans l'action volontariste des élus
locaux, ils seraient condamnés à une mort lente. Il n'est
pas acceptable d'empêcher les maires d'intervenir sur ces quartiers,
et il faudrait plus de souplesse en zone C. Vos explications ne m'ont pas
entièrement rassuré, Monsieur le ministre. Selon le texte
du Sénat, ne seront autorisées de nouvelles constructions
de logements que si des destructions équivalentes sont opérées
dans un délai d'un an. Détruira-t-on de veilles granges
du XVIème siècle au Tremblay ? Je propose par l'amendement
2 qu'on en revienne au texte adopté précédemment
par l'Assemblée.
M. le Rapporteur - La commission a repoussé. Non qu'à
titre personnel je ne sois pas en accord avec vous, mais il faut se
concentrer sur l'essentiel, et mettre en place au plus vite le coeur du
dispositif. Je souhaite donc un vote conforme.
M. le Ministre - Le Sénat a voulu empêcher un accroissement
désordonné de la population là où il y a des
nuisances sonores, ce qui se comprend. Quant à moi, je souhaite
avant tout qu'il n'y ait pas de retard pour l'entrée en vigueur
du projet. Mais je me suis engagé à préciser,
voire modifier les textes si, à l'usage, ils se révèlent
inapplicables ou pernicieux.
M. Francis Delattre - Faites une réunion de cellule !
L'amendement 2, mis aux voix, n'est pas adopté.
M. François Asensi - Le numerus clausus qu'on va instaurer empêchera
la réalisation au Tremblay de plusieurs très beaux
projets de grands architectes européens et américains, s'il
est appliqué à la lettre. Cela serait vraiment très
regrettable. L'amendement 1 supprime "n'excédant pas un an".
M. le Rapporteur - Je vous comprends, mais pour les raisons que j'ai
dites, avis défavorable.
M. le Ministre - Même position.
L'amendement 1, mis aux voix, n'est pas adopté.
L'article 4 bis, mis aux voix, est adopté.
L'ensemble du projet, mis aux voix, est adopté.
Prochaine séance, ce matin à 10 heures 30.
La séance est levée à 2 heures 25.
Le Directeur du service des comptes rendus analytiques,
Jacques BOUFFIER
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